[Exposé] L’invitation au voyage dans l’œuvre littéraire "OKU NO HOSOMOCHI" de Matsuo Bashō


 
 
INTRODUCTION

Durant cet exposé, nous allons nous intéresser au voyage dans l’œuvre Oku no Hosomichi de Matsuo Bashō. Dans une première partie, je présenterai brièvement Oku no Hosomichi et son auteur avec quelques indications supplémentaires sur le genre du kiko (journal de voyage). Dans un second temps, j'aborderai le contexte historique dans lequel ce journal a été rédigé et des différentes motivations qui ont poussées Bashō à partir sur les routes. Dans une troisième partie, je m'intéresserai à l’influence laissée par Bashō sur la culture du voyage et les liens entre l’œuvre littéraire Oku no Hosomichi et le tourisme moderne.

 

1) L’AUTEUR ET SON ŒUVRE POÉTIQUE

Matsuo Bashō 芭蕉松尾 est né en 1644 et mort en 1694, il a donc vécu pendant l’époque d’Edo. Il reste l'un des poètes les plus importants de l'histoire japonaise. Il est également connu pour avoir composé un grand nombre de journaux de voyage et a par ailleurs créé sa propre école de poésie dîte Shōmon 蕉門 . Son œuvre Oku no Hosomichi 奥の細道 a été traduite et éditée en langue française sous 4 versions différentes. Nous avons choisi d’étudier celle d’Alain Walter, datant de 2008 et publiée par les éditions Wiliam Blake and Co. sous le nom de « L’étroit chemin du fond ». 

Mon choix choix s’est porté sur celle-ci car elle contient de nombreux commentaires du traducteur qui facilitent la lecture de ces textes poétiques remplis de références obscures. Il est important de noter que Bashō est le créateur du haïku 俳句 (anciennement haïkaï 俳諧 ). Cette forme poétique typiquement japonaise est composée de dix-sept syllabes réparties en trois vers (5, 7, 5). L’auteur est également l’investigateur du haïbun 俳文. Il s’agit d’une composition littéraire dans laquelle prose et haïku se mêlent en une brève narration poétique d’une expérience réelle ou imaginaire. Le haïbun peut prendre souvent, mais pas exclusivement, la forme d’un récit de voyage. Ces poèmes sont des supports visuels, car ils décrivent la nature environnante. Ils peuvent être à la fois humoristiques et spirituels. Dans Oku no Hosomichi, le début de son périple est marqué par une riche expérience de la nature. Il parle de sujets du quotidien et promeut une nouvelle esthétique de la « légèreté » (karumi 軽み). Comme dans le poème suivant :

蚤虱馬の尿する枕もと

Traduit en français par Alain Walter :

« Puces et poux,

** Le cheval pisse

** A mon chevet… »    (p.89)

Cette poésie est humoristique : d’après le commentaire du traducteur, Bashō n’avait pas d’inspiration et s’ennuyait car il n’y avait pas de utamakura 歌枕 à visiter dans ces « montagnes sans intérêt » yoshinaki sanchuu よしなき山中. Les utamakura (poèmes-oreillers) sont des lieux célèbres de la poésie japonaise souvent décrits par d’anciens poètes dans leur poésie et renommés pour leur caractère historique, esthétique ou religieux. Dans son ouvrage Traces of Dreams—Landscape, Cultural Memory, and the Poetry of Bashô, Shirane Haruo, professeur en Littérature Japonaise à l’université de Columbia explique la signification et le fonctionnement des utamakura.

« En visitant les utamakura, le poète-voyageur médiéval espérait revivre l'expérience de ses prédécesseurs et s'émouvoir en composant des poèmes sur les mêmes paysages […]. Le journal de voyage lui-même est devenu un maillon de la chaîne de transmission poétique et littéraire. »

Je soulignerai leur importance dans l’œuvre de Bashō dans la seconde partie de cet exposé. Dans un autre exemple, contrastant avec le premier :

あかあかと日はつれなくも秋の風

Traduit en français par Alain Walter :

« Le soleil ardent

Brille sans pitié

Et pourtant le vent d’automne… » (p.103)

Ce poème centré sur la nature a été composé en chemin. D’après le commentaire du traducteur, Bashō se serait inspiré d’un célèbre waka de Fujiwara no Toshiyuki 藤原の敏行朝臣. Bashō n’a pas voyagé seul mais avec son disciple Kawai Sora. Ce dernier a également écrit un journal intime, le Journal de voyage de Kawai Sora (Sora Tabi Nikki 曾良旅日記 ) décrit de manière plus simple, plus prosaïque et rend ce voyage plus réaliste. En comparant le journal de Bashō avec celui de Sora, les lecteurs peuvent se rendre compte que Bashō a modifié l’ordre des visites de certains endroits ou encore prolongé ou raccourci certaines parties de l’itinéraire afin de pouvoir élaborer ses poèmes et les insérer dans le journal.

Leur périple a débuté le 27 mars 1989 et s’est terminé le 6 septembre de cette même année (Bashō avait déjà 46 ans). Ils partirent d’Edo pour se rendre dans la région intérieure d’Oku, au Nord. En environ 156 jours, ils parcoururent des milliers de kilomètres, principalement à pieds. Les arrêts célèbres incluent le sanctuaire shinto des Tokugawa à Nikkō, la barrière de Shirakawa, les îles Matsushima, Hiraizumi, Sakata, Kisakata et Etchū.

 

2) PRÉSENTATION DU GENRE DU KIKŌ

Oku no Hosomichi est un journal de voyage (kikō 紀行 ). Il s’agit d’une composition enregistrant et décrivant un voyage. La longueur du kikō diffère considérablement et peut être épisodique. Les entrées du journal peuvent varier de forme et être organisées par date, par événement, ou tout simplement sans division. La prose est principalement utilisée pour soutenir la poésie. Nous rappelons au passage que le Journal de Tosa (Tosa Nikki 土佐日記 ) écrit par Ki no Tsurayuki est le premier ouvrage de littérature de voyage qui fut considéré comme ayant une valeur littéraire. Ce dernier a contribué au développement des journaux intimes (nikki 日記 ) rédigés par certaines dames de cours durant Heian.

 

3 ) CONTEXTE HISTORIQUE

Bashō a vécu à une époque où, contrairement aux précédentes, les voyages étaient populaires. Durant Nara et Heian, les déplacements à travers le pays étaient en effet limités aux fonctionnaires, aux exilés, aux pèlerins et à ceux dont la profession les obligeait à voyager. Comme nous l’explique Constantine Nomikos Vaporis dans son ouvrage Breaking Barriers : Travel and the State in Early Modern Japan, pendant la période d’Edo, certaines barrières routières (seki 関 ) mises en place au VIIe siècle étaient encore présentes dans le but de contrôler les mouvements de la population à l’intérieur du pays.

Mais les voyages, et plus particulièrement les pèlerinages qui étaient pratiqués par toutes les classes sociales (notamment ceux de Ise et Shikoku) sont devenus moins limités. Sylvie Guichard-Anguis, géographe et japonologue chargée de recherche au CNRS, mentionne « des déplacements de la population dès l’époque d’Edo à des fins ludiques, sous couvert d’autres activités associées à la religion ou à la santé. » Les pèlerinages étaient des raisons valables pour entreprendre un voyage et rompre avec l’ordinaire. Il est donc important de ne pas catégoriser tous les pèlerins de la période Edo comme des personnes très religieuses accomplissant soigneusement leur devoir. Sur leur route, ils ont sans doute également été attirés et divertis par des choses qui n’étaient pas liés au but principal de leur voyage.

A la fin du XVIIIe siècle, on assiste au développement d’une véritable industrie du voyage avec une amélioration des routes principales et la création d’installations destinées à faciliter le voyage et divertir les voyageurs. Une littérature de voyage apparaît afin répondre à la demande populaire. Dans son livre intitulé Michiyuki-bun. Poétique de l’itinéraire dans la littérature du Japon ancien, Jacqueline Pigeot, spécialiste en littérature classique japonaise nous explique comment cette littérature a fait de certains toponymes des « lieux renommés » (meisho 名所) qui sont devenus des destinations touristiques très populaires durant Edo.

 

4) UN PÈLERINAGE LITTÉRAIRE À LA RECHERCHE DE LA VÉRITÉ

L’objectif du voyage de Bashō était multiple : il souhaitait dans un premier temps rencontrer ses disciples et ses amis présents dans le Nord du pays, tout en essayant d’attirer de nouveaux partisans pour son école de poésie. L’autre objectif, comme nous en avons déjà parlé précédemment, était celui de créer des poèmes en visitant des lieux célèbres de la poésie japonaise : les utamakura. Shirane Haruo note à ce propos une différence d’objectif entre d’un côté, les poètes de l’époque médiévale qui se déplaçaient vers les utamakura afin de confirmer ce qui existait déjà et renforcer les racines de la mémoire culturelle et de l’autre, Bashō qui souhaitait personnellement connaître ces espaces dans lesquels il voulait être inspiré et composer ses poèmes. Shirane estime que Oku no Hosomichi pourrait avoir été écrit à l’occasion du 500ème anniversaire de la mort du moine-poète Saigyō 西行 (décédé en 1190). Nous avons pu en effet constater les très nombreuses références à Saigyō présentes dans l’ouvrage. Il semblerait également que les déplacements de Bashō et Sora retracent le parcours d’un célèbre itinéraire de Saigyō. Dans l’ouvrage FOUR JAPANESE TRAVEL DIARIES OF THE MIDDLE AGES, les chercheurs Herbert Plutschow et Hideichi Fukuda remarquent que la mort est un sujet omniprésent dans les journaux de voyage. Nous avons par exemple pu constater cela dans le Journal de Tosa qui pourrait avoir été écrit par Ki no Tsurayuki en mémoire de sa fille décédée, puisqu’il l’évoque de nombreuses fois dans son journal. Ces voyages effectués par les poètes, souvent dangereux et éprouvants, ont pu leur rappeler la fragilité de leur propre existence. Pour continuer sur cette thématique de la mort, dans Oku no Hosomichi, Bashō écrit :

« Ces contrées qui m’ont touchées l’oreille mais que je n’ai pas encore vues de mes propres yeux, si jamais j’en reviens vivant... ».

Nous voyons bien qu’il était conscient de l'impermanence de la vie (mujo 無常 ) et qu’il avait étudié l’hypothèse qu’il puisse mourir sur la route (ce qui se produira réellement quelques années plus tard) Son voyage est une préparation métaphorique à la mort. Il a choisi de parcourir l’espace afin de découvrir des lieux et comprendre la nature des choses. Ogata Tsutomu, chercheuse en littérature japonaise, explique dans son ouvrage « Oku no hosomichi » o kataru, à propos de la poétique de Bashō :

« L’essence invariable du haïkaï de Bashô réside dans le changement incessant à travers la quête de la vérité, c’est Fu.éki-ryûkô 不易流行» (l'immuable et l'éphémère)»

Cette vérité, il l’a rencontrée à plusieurs reprises : le voyage, dont l’essence est le changement, a pu l’aider à comprendre la vérité permanente à travers le passage du temps. Shirane considère que ce que recherchait Bashō n’était pas une mort physique, mais une mort spirituelle et une renaissance. Il est probable qu’il ait vu son itinéraire spirituel se refléter à travers les changements de la nature au fil des saisons.  Tout au long du voyage, il a cherché à se découvrir et, par la même occasion, à découvrir l'humanité. Ce voyage n’est donc pas seulement un voyage dans l’espace géographique, mais également un voyage métaphorique. Un voyage solitaire et spirituel qui permet de révéler son intériorité (naimen 内面 ) Comme nous l’avons en cours avec Monsieur Bouvard au semestre dernier avec la campagne de publicité DISCOVER JAPAN, le fait d’envisager le territoire d’un point de vue esthétique et se retrouver soi-même à travers le voyage à la manière de Matsuo Bashō et de son disciple est encore bien ancrée de nos jours au Japon dans le domaine du tourisme.


Affiche de publicité pour la campagne DISCOVER JAPAN.

 

5) LA POÉSIE DE BASHŌ, UNE FORME DE KONTENTSU TSURIZUMU

Masubuchi Toshiyuki 単行本 , chercheur à l’Université Hōsei et auteur du livre Monogatari wo tabi suru hitobito: kontentsu tsurizumu to wa nani ka  soutient l’idée selon laquelle les visites entreprises par la population japonaise vers les lieux rendus célèbres par la poésie de Bashō durant la période d’Edo peuvent être considérées comme une première forme de tourisme de contenu (kontentsu tsurizumu コンテンツツーリズム ). Il s’agit d’un tourisme qui ne se concentre pas sur le format média mais plutôt sur le contenu. À savoir, les récits, les personnages et les lieux. La forme la plus importante de ce tourisme est de nos jours sont les pèlerinages sacrés (seichi junrei 聖地巡礼 ), une activité qui consiste à visiter des lieux du monde réel dont se sont inspirés les auteurs de mangas, animés, séries télévisées, films, jeux vidéo, etc. et dont se servent certaines localités afin d’accroître le tourisme dans leur région. Les personnes qui pratiquent des seichi junrei possèdent déjà certaines connaissances qu’ils ont acquises en regardant un film ou en lisant un manga, par exemple. Tout comme Bashō qui, grâce ses lectures d’ouvrages japonais et chinois, possédait déjà de nombreuses connaissances sur les utamakura avant même de s’y rendre. Dans les deux cas, on remarque que ces connaissances acquises avant même d’avoir fait l’expérience réelle de ces lieux encouragent les personnes à se déplacer pour entrer véritablement en contact avec de l'authenticité et combler leur soif d'apprendre.

 

6 ) L’INFLUENCE DE BASHŌ

Le voyage de Bashō s’inscrit dans la lignée de divers autres poètes et lettrés voyageurs qui l’ont précédé, à la fois sur la route et dans la pratique poétique. Comme preuve de l’héritage laissé par Bashō à travers son périple, nous pouvons, parmi beaucoup d’autres, citer le travail du peintre et poète Yosa Buson et sa peinture réalisée pour le rouleau du Oku no Hosomichi. Il s’agit d’une scène qui représente le début du voyage de Bashō et de son disciple. Buson a peint de nombreuses scènes du quotidien et de ses voyages.

奥の細道,与謝蕪村 (1779) conservé au Itsuo Art Museum. Ikeda, Osaka.

De nombreux mangas, comme Samurai Champloo サムライチャンプルー, s’inspirent également d’une tradition de voyage rendue célèbre par Bashō. L'histoire se déroule dans une version fictive de l'époque d’Edo, où l’on suit les aventures des trois personnages principaux qui voyagent à travers le Japon.

Les journaux de voyage de Bashō qui se lisaient à son époque un peu comme des guides de voyage inspirent encore de nos jours de nombreux japonais qui entreprennent des pèlerinages dans le but de renouer avec une tradition littéraire. Dans sa publication intitulée Japanese Travel Culture : An Investigation of the Links between Early Japanese Pilgrimage and Modern Japanese Travel Behaviour, Leah Watkins, chercheuse néozélandaise en marketing et qui s’intéresse au tourisme au Japon, souligne qu’un pèlerinage, dans le contexte japonais, n’est pas forcément religieux. N’importe quel prétexte peut être sujet à la réalisation d’un pèlerinage. Ils peuvent être appréciés sans restriction morale et sans perdre leur statut de « pèlerinage ». Plutôt que de simplement contempler un paysage, d’autres aspects peuvent intéresser les japonais lorsqu’ils voyagent. Par exemple, la nouveauté ou l’apprentissage.

 

CONCLUSION

En plus d’offrir des témoignages inestimables sur le passé, l'œuvre Oku no Hosomichi et sa poésie nous révèlent un goût sans cesse renouvelé pour le voyage qui perdure encore de nos jours à travers la culture populaire.  je pense que cette pratique continuera d’exister car tout le monde, à travers le voyage et le contact avec la nature peut ainsi échapper à son quotidien pour se redécouvrir. Nous pouvons néanmoins nous demander quelles formes prendront ces voyages dans le futur.

 

BIBLIOGRAPHIE

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Shirane, Haruo, Traces of Dreams—Landscape, Cultural Memory, and the Poetry of Bashô, Stanford University Press, 1998.

Tsutomu, Ogata, « Oku no hosomichi » o kataru /「おくのほそ道」を語る, Japon, Kadokawa Shoten, 1997.

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Watkins, Leah, Japanese Travel Culture: An Investigation of the Links between Early Japanese Pilgrimage and Modern Japanese Travel Behaviour, décembre 2008.

Lien : http://citeseerx.ist.psu.edu/viewdoc/download?doi=10.1.1.732.2554&rep=rep1&type=pdf

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